Par Jérôme « Whispe » Labadie
En dépit d’indéniables qualités certains jeux tombent dans l’oubli ou ne trouvent pas la communauté qu’ils méritent. La domination du marché par une poignée d’acteurs et la multiplication de financements participatifs cassent ainsi la hype autour de jeux qui pourtant auraient un large potentiel de réussite. Mais un jeu n’en est pas pour autant mort et l’excellent Wrath of Kings aurait pu avec une meilleure communication se poser en sérieux challenger sur son format. Ne serait-ce que pour son excellence mécanique !
Souvenirs, souvenirs…
Ce qui attire l’œil lorsque l’on jette un œil à l’univers visuel de Wrath of Kings, c’est cette tonalité si unique propre à Edouard Guiton. Les vieux figoludistes y reconnaitront la patte du papa d’une colossale quantité de charadesign pour Conf’ depuis la naissance de ce dernier.. C’est là que prend forme toute la « badassitude » de WoK. le moindre point de l’univers est empli de cette touche si personnelle et, défi réussi à merveille par les sculpteurs, les figurines sont identiques à ce lot de concept si particuliers. Il va sans dire que Coolminiornot sait exploiter la french touch avec talent. On retrouvera ainsi des pièces très charismatiques et typées (leur Lycanthropes sont superbes) qui pourraient ravir peintres comme joueurs. La gravure laissant pas mal de souplesse quand au niveau nécessaire pour les mettre en valeur!
Pas de sorties ? Et Après ?
On pourrait reprocher au jeu son absence de sortie ou de prévisionnel. Les sorties sont passées en 2 grosses vagues, le KS d’abord puis une Wave 2 en 2017. On ignore si d’autres références verront le jour toutefois, le lot de références déjà disponibles et la variété de composition d’armées qu’elles offrent, le jeu est largement auto-suffisant. Et de plus, cela offre la possibilité de constituer une faction complète assez facilement. Quand aux références épuisées, on peut se les procurer assez facilement en fouillant sur le web.
Financé en 2013 par un KS convenablement réussi ( à l’échelle coolminiornot, 700000 dollars soit pas loin du résultat du premier zombicide), et sorti plus officiellement en 2015, Wrath of Kings semble cependant avoir peiné à se creuser une place sur les tables de jeux. WoK propose 3 formats de jeu grâce à un système de scénarios et composition d’armée astucieux qui permet de jouer d’une dizaine à presque une cinquantaine de figurine sans modification du système. Ainsi avec un ticket d’entrée à 70 euros, les starters offrent déjà une vraie possibilité de jeu
Si les règles sont simples, les subtilités propres à chaque unité en font un jeu avec une sacré courbe d’apprentissage afin d’être maîtrisé, chaque faction bénéficiant d’un gameplay aussi marqué que son identité visuelle !
Parlons peu, parlons fluff !
Bien, l’ensemble est survolé sous forme de nouvelles dans le livre de règles et sur le site web de l’éditeur. Petit résumé rapide :
Nous sommes sur le continent d’Arikania, et comme dans tous nos univers, c’est un joyeux bazar. D’abord dominé par des êtres célestes, puis par des dieux élémentaux qui bannirent les précédents, le continent baignait dans la magie. Les élémentaux, du nom d’Efrenti, asservirent les mortels durant plus de 100 générations. Quand subitement un type doté d’un pouvoir oublié depuis des temps immémoriaux se pointe, bannis tout ces élémentaires, casse quelques mâchoires histoire de réunir les mortels et de leur offrir une chance de reprendre leur destin en main. L’ancien roi, comme on l’appelle donne ainsi 5 royaumes à ses fils, les rois scions, des sortes de sous-monarques afin qu’ils façonnent chacun leur territoire à leur image. A presque 2500 ans, l’Ancien Roi s’éteint consumé par l’incapacité de ses fils à conserver une bonne cohésion familiale plutôt qu’à se noyer dans leur ambitions impériales individuelles. En quelques heures, les rois scions et leurs factieux mirent la capitale à feu et à sang, désireux de reprendre le trône de leur père. C’est ainsi que depuis près de 350 les différentes maisons, héritières de ces derniers s’affrontent pour imposer sa conception du monde en Arikania loin de toute considération de conservation et de maintien de l’héritage de l’Ancien Roi. Si seul deux des rois Scions sont apparemment toujours en vie, tous leurs héritiers veulent tirer profits de cette longue crise.
Les cinq maisons
Une chose notable est qu’il n’y a dans Arikania ni gentil ni méchant, juste des conceptions du monde menant à des choix plus ou moins orduriers. Les maisons portent le nom du roi Scion qui les a fondées.
La maison Teknes est assez proche d’une république communiste industrialisée, ayant évincé un pouvoir corrompu à leur goût après une révolution bien sanglante. Malheureusement, cette utopie est vite devenue une volonté de suprématie humaine et tous les moyens sont bons pour y parvenir. Dotés d’une technologie particulièrement avancée, les soldats et dirigeants du Felskar (une bonne partie étant des Addanii, une espèce d’humains sans croissance) n’hésitent pas à mener d’horribles experiences terribles sur les humains de tous âges et les animaux, afin de constituer un force armée à la mesure des projets de leur maison.
Le royaume de Hadross est majoritairement sous-marin. Le roi héritier ceda son peuple à d’anciens dieux, les « Deep voices » et ces derniers firent muter les humains pour leur offrir une meilleure adaptation à leur environnement. Les habitants d’Hadross naissent humains et mutent plus tard, après avoir entendu l’appel des « Deep Voices ». Ils n’ont pas de velléité de conquête aussi poussées que les héritier des autres rois Scions mais ils ne portent pas les autres peuples dans leur cœur pour autant !
La maison Nasier reigne sur Kartoresh, son peuple voue un culte fanatique aux Efrentis bannis par l’ancien roi et canalisent une puissante magie liée au élémentaires par le biais de puissants masques, alors que d’autres choisissent de fusionner avec la magie des élémentaires, devenant de massifs être cornus et musculeux. Ce peuple souhaitent un retour des Efrentis, et par une noble servitude objectent de devenir la nouvelle classe dirigeante, grâce à cette ancienne puissance qui les rendraient plus puissants que n’importe quelle nation des rois scions !
En tant que premier fils de l’ancien roi à bâtir sa nation, la plus grande d’Arikania, il s’estime être le plus légitime quand à posséder le pouvoir suprême. Surnommé le roi des flammes, il refera le monde à son image !
La maison Shael-Han estime être la lumière en cette ère sombre, la reine Scion qui les dirige considère que ses frères ont détruit l’œuvre de son père et, comme seule présente sur son lit de mort, elle est la dernière porteuse de la volonté et des derniers mots de ce dernier. Benie par les dieux célestes, la nation insulaire d’Achrion s’appuie sur un solide système de castes. Melant magie et technologie, la pieuse nation guidée par sa reine s’apprête à finir les plans de l’ancien roi !
Telloria, la nation de la maison Goritsi est divisée en petits états contestataires dirigés par ses descendants. Il y règne des monstres anciens, le roi échangea son humanité pour le pouvoir. Dès lors, certains nobles touchés par le Don rejoignent les forces de la nuit. Loup-garous et vampires, nobles corrompus par le don maintenant un fragile équilibre entre apaisement de la population et machination dans l’ombre, il ne fait pas bon être un simple citoyen en Telloria, le risque d’être boulotté une nuit ou l’autre étant un possibilité non négligeable. La maison voit la guerre comme un mal nécessaire pour transmettre sa culture supérieure au reste du monde !
Simple et efficace
Les règles sont courtes, en 9 pages seulement, l’ensemble des bases est couverte. Les compos varient autour d’un nombre de rang de leaders, rang d’infanterie et de spécialistes croissant en fonction du format de jeu avec une partie de compo « optionnelle » (apparemment exploitée en tournoi comme partie adaptative de la formation). Basiquement, les profils indiquent le mouvement, la volonté, l’armure et les blessures ainsi que le tableau de défense, indiquant quand la figurine parvient à se protéger et quand elle subit une ou 2 blessures. On compare le résultat d’attaque au tableau et on applique si le nombre de blessure égale au moins l’armure la perte de points de vie.
Le verso indique quand à lui les attaques et compétences de la figurine.
Chaque figurine dispose d’une Manœuvre (un mouvement) et d’une action (attaque, course, attaque combinée, compétence ou saisie d’objectif) par tour. Le point essentiel du jeu est la « Sphère of Influence » qui permet au leader d’activer plusieurs figurines partageant un même trait dans un rayon de 6 pouces en même temps, lui y compris s’il partage le même trait, de 3 à 7 selon le format (+2 en portée et nombre de fig pour le commandant). Les spécialistes quand à eux s’activent un par un. L’activation évidemment est alternée, comme dans tout jeu moderne qui se respecte. Le but est de réduire le pool de points de Moral de l’adversaire à zéro pour remporter la victoire.
Ce petit truc en plus
Le type d’activation crée déjà une dynamique intéressante mais la grande force du jeu vient du moyen d’atteindre la victoire. La base de Moral est calculée en fonction du nombre de figurines en jeu (1 pour 3) et chaque perte de 3 figurines réduit le Moral d’un point. Sauf que, la table rase est extrêmement difficile à obtenir, et les objectifs faisant perdre un Moral non négligeable, il va falloir justement doser entre meule et suivi du scénario pour s’assurer la victoire ! Les objectifs sont asymétriques et liés aux motivations de la faction. Chaque faction peut choisir parmi un des trois scénarii d’une de ses motivations (2 par factions soit 6 scénarii accessibles). Les motivations sont l’honneur, la trahison, l’avarice, la vengeance ou l’intrigue. L’accomplissement de la plupart des objectifs laisse peu de place à l’erreur et il faut jauger justement le ratio entre sacrifice et perte de moral infligée.
Un autre point fort sympathique est le système d’entraînement et d’inspiration, qui offre la possibilité de changer significativement le gameplay au sein d’une même faction. En effet, le commandant d’armée choisi en début de partie offre sa compétence d’entrainement à toute la faction. Les leaders en général lorsqu’ils font partie d’une activation combinée partagent leur inspiration avec leurs congénères activés au même moment.
La chance ?
Contrairement à l’impression que peut laisser le système de blessures, 1 à XD10 sur un tableau de défense, il n’en est rien. En effet, entre les réactions et tout un lot de compétences et de synergies entre leader spécialistes et infanterie permettent de moduler ce coté chance, par le biais de relance ou la possibilité d’affecter le tableau en lui-même. Il en résulte des combats létaux où la part belle est faite aux attaques coordonnées en vue de raser les unités les plus solides. Les spécialistes quand à eux apportent une touche de personnalité par le biais de compétences soit de soutien, soit purement brutales. Le jeu est très centré sur le corps à corps mais les quelques attaques de tir ou de magie peuvent faire la différence en ciblant les unités qui y sont le plus vulnérables.
Les compétences propres à chaque unité donnent une profondeur et une personnalité très marquée à chaque faction.
Pour conclure :
Cet avis n’engage que moi évidemment mais sur ce type de format, Wrath of kings survole de loin ses concurrents principaux, que ce soit sur l’interactivité et le coté punchie. Si le concept est évidemment assez différent des leaders du marché, l’univers visuel autant que l’aspect mécanique méritent que l’on s’y penche très largement. Les anglophobes peuvent se rassurer, la trad amateur VF, trouvable sur le forum est très précise et se lit rapidement. Avec un ticket d’entrée très correct pour une trentaine de figurines (soit de quoi jouer en format escarmouche), Coolmini nous offre un jeu unique, fluide et rapide ou l’ennui n’a pas sa place, chaque action pouvant entraîner une réaction presque immédiate (voire immédiate selon les compétences). Amateurs du format, foncez sans hésiter!
Et bien sûr, tradiwhispe oblige!
Bien bel article mon cher whispe. Tu as parfaitement raison, un jeu qu’il faut essayer absolument. Les figs (pour moi shael han) sont un vrai plaisir à peindre.
En fait je ne connaissais que de nom et je n’avais jamais eu l’occasion de voir l’aspect des figs… Elles sont super jolies en vérité !! ^^
Un article fort intéressant avec un langage soutenu… Voilà qui tranche radicalement de ton style habituel sur ton ancien blog XD
C’est très appréciable ^^
Serviteur,